C’est avec le typogaphe que votre papeterie créative termine cette belle série de l’été consacrée aux métiers du papier.
Du « travail de labeur » …
L’art de la typographie consiste à créer des caractères mobiles en plomb destinés à l’impression sur papier. Le typographe crée lui-même la forme des lettres, qu’il coule dans des moules grâce à un alliage de plomb et d’étain. Au final, il obtient des tiges métalliques surmontées d'une lettre, d'un signe ou d'un chiffre inversé et en relief.
Pour composer le texte à imprimer, il aligne à la main les caractères sur un composteur. Il a ainsi la tâche d’évaluer l’encombrement des lettres et des espaces, afin de justifier les lignes et de les interligner.
Après les tirages d’essais, les retouches et les corrections nécessaires, le bloc de lignes (la composition) est placé dans un châssis (la forme typographique), lui-même fixé sur un chariot mobile (le marbre) qui glisse sous une presse typographique à cylindre qui assure la pression utile à l’impression.
Une fois l’impression terminée, le typographe range à nouveau les caractères dans leurs tiroirs en bois, appelés casses.
… à la création typographique numérique
A l’ère digitale, les artisans typographes qui exercent encore se font rares et ont tous plus de soixante ans. Pour des raisons de délais, de coût, mais aussi de dangers liés à la manipulation du plomb, leur activité se limite à la composition d’ouvrages d’art et de livres d’artistes. Certains s’associent à des graveurs et des relieurs d'art afin de créer dans le domaine de l'édition originale ou de la bibliophilie. Quelques ateliers d'impression réalisent toujours des faire-part, des cartes de visite, des entêtes et des papiers à lettres.
Si l’impression typographique est quasiment révolue, la création typographique est quant à elle bien vivante ! Elle s’exprime désormais numériquement à travers la conception et le design graphique.
La création de nouvelles polices numériques à la fin du XXe siècle a même marqué un réel renouveau de la typographie artistique. Graphistes et artistes créent ainsi pour la publicité, mais aussi pour la littérature et la signalétique. La lettre peut devenir un élément visuel à part entière, pour servir une identité visuelle ou donner sens à une œuvre. Grâce aux nouvelles technologies, elle peut être animée en 3D.
Un artiste typographe français possède une renommée mondiale, il s’agit de Philippe Apeloig. Ses affiches, sur lesquelles il modèle les lettres et les mots, ont été vues à Paris, à New York et à Tokyo. Le « P » du Petit Palais et les logos du Châtelet, c’est lui qui les a conçus. Tout comme des polices de caractères, sorties de sa seule imagination.
Histoire de la typographie
Héritière de la xylographie, l'art de graver du bois, la première typographie a été réalisée à partir d’une planche de bois gravée. Ensuite, les Chinois au XIe siècle, puis les Coréens et les Hollandais au début du XVe siècle s’essayèrent à la typographie mobile en terre cuite.
Au milieu du XVe siècle, Gutenberg inventa la typographie basée sur l’utilisation de caractères fondus en plomb et d’une presse à bras, qui permet d’imprimer le papier recto-verso grâce au réglage de la pression.
Les premières œuvres typographiques françaises furent des livres liturgiques réalisés à partir de manuscrits médiévaux.
Puis, Italiens et Français instaurèrent les principes de conception de la lettre romaine (les caractères droits) et de l’italique (les caractères penchés), dont l’utilisation fut généralisée au début du XVIè siècle dans toute l’Europe, puis dans le monde entier.
L'art typographique était alors aussi bien un ornement qu’un moyen de communication. Il fut officiellement reconnu pour son esthétisme en 1880, avec l’essor des arts graphiques et le renouveau des arts décoratifs. Au début du XXe siècle, nombre d’artistes se passionnèrent pour la typographie, comme Guillaume Apollinaire et le mouvement DADA.
Avec l’apparition de la photo-composition dans les années 1970, la typographie disparut de l’impression de masse et fut remplacée par l'offset. Le dernier livre qu’elle imprima en 1992 fut un « Que sais-je ? ».
Dès la mécanisation des ateliers à la fin du XIXe siècle, qui permit de taper les lettres directement sur un clavier, plutôt que d’avoir à les lever de la casse, de nouveaux métiers descendants du typographe apparurent, comme celui de compositeur. Puis celui de metteur en page avec l’arrivée de l’informatique.
Devenir artisan typographe
Il n’existe malheureusement plus de formation d’artisan typographe, et l’on déplore un manque de transmission des gestes de ce métier traditionnel.
Envie d’en apprendre davantage sur la typographie contemporaine ?
Nous vous conseillons le livre « Créations typographiques de 1985 à nos jours », de Cees W de Jong, Alston W.Purvis et Friedrich Friedl.
Notre série de l’été s’achève ainsi…
Mais n’hésitez pas à (re)découvrir le calligraphe, l'enlumineur, l'imagier au pochoir, le relieur et le marbreur sur papier !
Rendez-vous très vite pour l’anniversaire de Mille et une feuilles, avec de bien belles surprises !
Cécile Douay
Si je vous dit « marbré à fleurs, à fleurons, à tourniquets, marbré d’Allemagne, Annonay, zigzag, plume de paon, œil de chat, peigné, agate, placard, montfaucon, caillouté… », à quoi cela vous fait-il penser ? …
Ce sont tous des motifs traditionnels de papier marbré ! Comment les obtient-on ? C’est ce que votre papeterie créative va vous expliquer, en partant à la découverte du métier de marbreur sur papier. Suite de notre série de l’été sur les métiers du papier, après le calligraphe, l'enlumineur, l'imagier au pochoir et le relieur.
Marbreur sur papier : un métier rare
La demande étant faible de nos jours, moins de dix professionnels se dédient exclusivement à la marbrure manuelle. Aujourd’hui, la majorité des marbreurs complètent leur activité de savoir-faire connexes, comme la peinture, la décoration, la reliure d’art ou la réalisation de petits objets recouverts de papier marbré (boîtes, accessoires d’écriture, abat-jour…).
La reliure artisanale et la décoration de livres restent les principales utilisations de la marbrure. D’ailleurs, la plupart des ateliers de reliure fabriquent leur propre papier marbré, afin de s’adpater à la reliure et au contenu du livre.
Les marbreurs d’aujourd’hui s’adonnent aussi bien à la reproduction d’anciens papiers marbrés pour la restauration de reliures, qu’à la création de nouveaux motifs à partir de textures, de peintures et de procédés différents.
Le principe de la marbrure ? Sur de l’eau contenue dans une cuve et épaissie par une gomme hydrosoluble, le marbeur dépose des gouttes de peinture à l’huile ou à l’eau, puis les travaille à l’aide de pinceaux plats, de peignes, de baguettes et de pointes. Il pose ensuite la feuille de papier sur le motif, afin d’obtenir une empreinte par transfert. Tout son art réside dans le bon dosage des couleurs et la façon de les disperser.
Un art venu du Japon
Au XIIe siècle, les Japonais fabriquaient des suminagashi ou « encres flottantes » avec de l’encre de Chine et de l’eau de source. Les feuilles obtenues servaient pour la calligraphie de poèmes et pour les documents officiels, difficilement falsifiables à cause des motifs.
Les pays ottomans reprirent cette technique en utilisant des gouaches ou des pigments broyés, des couleurs plus vives et une eau épaissie avec de la gomme adragante pour que la peinture flotte mieux. Le papier marbré fabriqué avec technique appelée «Ebru» ou «art du nuage» était également dédié aux calligraphies de poèmes et aux documents officiels.
C’est ce procédé de fabrication qui a perduré à travers les générations, et perdure toujours.
En Europe, la marbrure fut adoptée à l’ère baroque pour la décoration, la reliure, la tabletterie. C’est à M. Ruette, un relieur du roi Louis XIII, que l’on doit l’appellation de « papier marbré », lorsqu’il employa cette technique pour reproduire sur papier des motifs de marbre.
Une des innovations majeures ayant enrichi le métier de marbreur fut celle de Lebreton à la fin du XVIIe siècle, qui réussit à utiliser des couleurs d’or et d’argent en complément des couleurs traditionnelles.
Le coût de la marbrure manuelle étant très élevé, la production fut mécanisée à la fin de XIXe siècle pour répondre à l’utilisation courante de papier marbré. Selon le procédé Putois inventé en 1900, une machine imite les mouvements de la main du marbreur.
Deux marbreuses professionnelles
Elles peignent sur l’eau et exercent leur art avec passion. Elles nous parlent du métier de marbreur et nous montrent en vidéo comment réaliser un papier marbré. Attention, vous allez voir opérer la magie sous vos yeux !!
L’artiste Zeynep Uysal Kog, à découvir ici :
Et Marie-Anne Hamaide, à découvir ici :
Apprendre la marbrure sur papier
Envie de vous lancer dans l’art du papier marbré ? Adressez-vous directement aux professionnels qui proposent des stages d’initiation et recrutent ainsi leurs apprentis.
Poésie, couleurs, savoir-faire, création artistique, en voilà un métier magique !
Cécile Douay
Votre papeterie créative vous a déjà présenté le calligraphe, l'enlumineur et l'imagier au pochoir. Poursuivons notre voyage estival à travers les métiers du papier avec celui de relieur !
Le travail du relieur consiste à habiller un livre afin de le protéger, de faciliter sa consultation, mais aussi de l'embellir. Pour cela, il doit posséder une sensibilité artistique, faire preuve de minutie et bien évidemment s'intéresser au monde du livre.
Contrairement au brochage, qui n'est pas aussi solide, la reliure consiste en la couture de cahiers, la pose de plats rigides ou flexibles non solidaires du corps d'ouvrage et d'un matériau pour les recouvrir.
Dès les débuts de la reliure, l'objectif fut certes de protéger les écrits, mais aussi de travailler l'esthétisme des livres. Aussi, les premières couvertures des ouvrages religieux se sont rapidement ornées d'ivoire, d'émail, de feuilles d'or et d'argent. Des livres ainsi reliés et décorés ont donné naissance à de véritables œuvres culturelles et artistiques.
La reliure aujourd'hui
Aujourd'hui en France, la reliure à la main (reliure courante et reliure d'art) rassemble 1 800 professionnels répartis dans environ 240 ateliers de reliure manuelle, alors que l'ensemble du secteur (reliure industrielle, semi-industrielle et artisanale) représente 400 ateliers. 2/3 des relieurs travaillent seuls, tandis que seulement 4 à 5 ateliers dénombrent plus de 30 personnes. La Bibliothèque Nationale de France, le Sénat, l'Assemblée Nationale et certains musées possèdent leurs propres ateliers. Un relieur peut ainsi être soit artisan, soit fonctionnaire, soit salarié.
Il peut exercer son art dans trois domaines, définis selon l'usage du livre et le type de reliure :
A l'origine de la reliure, le livre
La reliure est apparue entre le IIe et VIe siècle après J.C., suite à la naissance au Ier siècle du codex, cet ensemble de feuilles pliées en cahiers, que l'on relie ensuite pour former le livre-objet que nous rangeons aujourd'hui sur nos étagères. La reliure est alors cet acte essentiel de l'assemblage des cahiers, nécessaire à leur lecture, mais surtout à la conservation des écrits : elle permet que la mémoire perdure à travers les âges.
Au VIe siècle, l'artisan relieur ne faisait que relier les cahiers et poser les deux plats de la future reliure, constitués de planchettes en bois. Celles-ci étaient ensuite recouvertes de cuir, de toile ou de métal, parfois consolidées par des renforts métalliques et équipées de fermoirs. L'orfèvre ou l'émailleur finissaient de donner toute leur splendeur à la couverture.
Ainsi, les nombreuses couvertures fabriquées au Moyen-Age ont fortement influencé l'art de la reliure et inspirent encore nos relieurs contemporains.
Au XVe siècle, les reliures deviennent plus raffinées, rehaussées d'étoffes luxueuses (soie, velours, brocart), de broderies et de pierres précieuses, de fermoirs finement ciselés.
A la Renaissance, l'art de la reliure atteint un très haut niveau de perfection. Grâce au savoir-faire réputé de ses relieurs, la France devient une référence dans le monde du livre en Europe. François 1er fait créer une école de reliure artistique, propageant ainsi le style français.
L'arrivée de l'imprimerie marque le plus grand développement de l'art de la reliure, mais aussi du métier de relieur. Alors qu'entre 1490 et 1535, il y avait à Paris 140 relieurs, on en comptait 200 entre 1550 et 1585. En 1539 est même créée la prestigieuse fonction de relieur du roi.
Avec l'usage plus courant des livres et la diminution de leur taille, la reliure s'allège de ses éléments lourds. Les ais de bois sont remplacés par du carton, la reliure doit gagner en rentabilité et en rapidité d’exécution pour assurer la diffusion du livre. Désormais, les libraires commandent en série des volumes reliés.
Aux XIXe et XXe siècles, l'art de la reliure devient plus scientifique. Les connaissances technologiques plus poussées complètent le savoir-faire artisanal et permettent la mise en œuvre de techniques de conservation préventive et de restauration des livres.
Un tournant s'opère au XXe siècle, avec l'arrivée de la reliure de création qui donne une plus grande liberté au relieur. S'affranchissant des normes de la reliure d'art traditionnelle, il peut enfin créer une reliure en accord avec les idées développées par l'écrivain dans le livre. Cette nouvelle génération de relieurs s'exprime désormais avec de nouvelles techniques et de nouveaux matériaux.
Deux femmes relieurs à l'honneur
Envie de découvrir la reliure en images ? Découvrez le travail de deux femmes relieurs françaises :
Aude Quéré, artisan Relieur dans le 18e à Paris : Vidéo A la rencontre de ...
et Nathalie Lemaitre, relieur Meilleur Ouvrier de France à Paris : Vidéo A la rencontre de ...
Devenir relieur
Du CAP arts de la reliure au diplôme supérieur d'arts décoratifs, il existe en France plusieurs formations initiales au métier de relieur. Quiconque souhaite se reconvertir dans ce métier d'art et acquérir une qualification professionnelle peut aussi suivre une formation continue. Toutes les informations nécessaires sont disponibles auprès de l'Institut National des Métiers d'Art.
Une bonne idée à souffler à un jeune à l'aise avec le travail manuel, vous ne trouvez pas ?
Cécile Douay
Après le calligraphe et l'enlumineur votre papeterie créative vous propose de découvrir un autre métier du papier, celui d'imagier au pochoir.
Issu des arts graphiques, le métier d'imagier au pochoir est malheureusement en voie de disparition. Présent dans divers secteurs d'activité, comme la décoration, la mode ou l'ameublement, il n'est pourtant plus une profession à part entière.
Ainsi en France, l'Imagerie d'Épinal dans les Vosges - créée en 1796 par Jean-Charles Pellerin, est désormais la seule à employer des imagiers au pochoir au sein de son effectif de dix-sept personnes. Leurs réalisations vendues en boutique sont prisées des collectionneurs, de certaines institutions et d'entreprises privées.
La peinture au pochoir, une technique ancestrale
Le métier d'imagier au pochoir consiste à mettre en couleur des images à l'aide de plaques ajourées.
A partir d'une image en noir et blanc imprimée sur du papier, le coloriste découpe lui-même ses pochoirs dans du métal ou des feuilles d'aluminium. Ce travail est réalisé grâce à une pédalette, une machine équipée d'une scie métallique et qui ressemble à une machine à coudre à pédale.
Le coloriste confectionne un pochoir par couleur à appliquer.
Ensuite, il pose ses pochoirs sur l'image à colorer - elle-même imprimée sur du papier Vélin d'Arches - et applique ses couleurs à l'aide d'un pompon (pinceau à pochoir), d'un tampon ou d'un pochon (une brosse autrefois composée de poils de sangliers est maintenant faite de nylon).
De même, la gouache a suppléé les pigments autrefois naturels, moins aisés à utiliser et plus longs à sécher.
Afin d'éviter dépassements et bavures, le coloriste peut utiliser deux astuces : soit la technique du martelage qui permet de renforcer le contour de la découpe avec un poinçon et un marteau, soit celle de la graisse de lard qui consiste à frotter le dos des pochoirs avec un bout de lard, dont la graisse hydrofuge repousse l'eau contenue dans la gouache.
La peinture au pochoir à l'ère moderne
En dehors des images d'Epinal, la technique du pochoir est toujours d'usage pour la peinture sur tissu dans les domaines de la mode et de l'ameublement. En déco intérieure, on la retrouve dans la peinture murale et sur meuble. Enfin, les artistes de rue utilisent également des pochoirs en carton et de la peinture en bombe pour décorer les murs de nos villes.
Découvrir le métier d'imagier au pochoir
Le métier d'imagier au pochoir n'est désormais plus enseigné dans aucun établissement.
Néanmoins, il reste possible de découvrir la technique du pochoir à l'Imagerie d'Epinal, qui présente toute l'année au grand public son savoir faire et ses artistes. Une bonne idée de sortie culturelle si vous passez vos vacances dans les Vosges, n'est-ce pas ?
A Ploubazlanec, dans les Côtes d'Armor, l'Atelier de coloris à la main est spécialiste de la peinture au pochoir et de la reproduction d'œuvres picturales. Les coloristes Nathalie Couderc et Christine Menguy présentent sur leur site internet les différentes étapes de mise en oeuvre et des exemples de réalisations. On y voit combien l'art du pochoir requiert patience, minutie et maîtrise, ainsi qu'un sens aigu des couleurs.
Et vous, vous sentez-vous l'âme de ce métier d'artiste ?
Cécile Douay
Etes-vous paré pour une nouvelle destination dans l'univers des métiers du papier ? Attachez vos ceintures, après le calligraphe, votre papeterie créative vous emmène à la découverte du métier d'enlumineur !
Enluminure, du latin illuminare : l'art de mettre en lumière
L'enluminure est art qui date du Moyen-Age et qui consiste à illuminer un texte ou un document grâce à des décors riches et entièrement peints à la main, que ce soit sur du parchemin ou sur du papier.
Les enlumineurs d'aujourd'hui exercent leur talent soit à travers la restauration et la copie de manuscrits moyenâgeux ; soit à travers la création de diplômes, de menus, d'arbres généalogiques et de cartes de vœux, d'affiches, de logos et de publicités et même d'œuvres originales parfois exposées.
Il y a actuellement en France environ soixante enlumineurs professionnels.
Parmi les plus illustres, Claire Biteau-Guillemain vient d'être nommée Maître Artisan en Métier d'Art par La Chambre des Métiers de Maine-et-Loire et la Mission régionale des Métiers d’Art. Depuis son atelier installé près de Cholet, elle crée pour les particuliers, les collectivités et les entreprises, elle expose aussi, dispense des cours dans l'ouest de la France. Durant l'été, vous pouvez la rencontrer au Puy du Fou en Vendée dans son atelier situé dans le village XVIIIe siècle. Si vous passez vos vacances dans le Marais Poitevin, faites un tour à Coulon à l'Atelier du 112, un atelier-galerie qui accueille chaque été des artistes calligraphes et enlumineurs. Claire Biteau-Guillemain y expose quelques réalisations.
Une autre femme, Barbara de Monchy, s'est également fait un nom dans le domaine de l'enluminure. La fondatrice et directrice de l'INSEEM (Institut Supérieur Européen de l'Enluminure et du Manuscrit) d'Angers, le seul établissement en Europe à décerner le titre d'enlumineur, est décorée de l'Ordre National du Mérite au grade de Chevalier.
Histoire de l'enluminure
Dès le VIe siècle, elle est pratiquée dans les monastères, à la gloire de Dieu. Alors que l'écriture est en pleine expansion, les moines travaillent intensément à recopier et décorer les manuscrits religieux et textes d'auteurs. Naissent ainsi de véritables œuvres d'art, un patrimoine culturel et religieux.
A l'aide de pigments naturels, de feuilles d'or et d'argent, le moine enlumineur enrichit et embellit textes et lettrines calligraphiés à l'encre noire ou sépia. Pour aider à la lecture, paragraphes et chapitres sont mieux identifiés. Rinceaux, entrelacs et motifs sont empreints de messages et de symboles qui facilitent la compréhension du texte pour les non lettrés.
Les lettres historiées comportent des récits, les lettres ornées déploient des motifs végétaux et géométriques, les lettres figurées contiennent des personnages et les lettres zoomorphes des animaux.
L'art de l'enlumineur s'exprime à tous les endroits : dans les espaces laissés par le calligraphe, au début, dans le corps du texte et à la fin des pages. Les marges et bordures sont rehaussées de courbes, d’entrelacs, de rinceaux d'inspiration végétale ou animale.
A partir du XIIIe siècle, la production artistique sort des monastères et la corporation des maîtres enlumineurs est créée. Le manuscrit enluminé symbolise désormais la richesse et donne un grand prestige social à son possesseur. Les rois, les princes, les nobles et les marchands se dotent alors d'ouvrages enluminés, tels que livres de familles, bestiaires, herbiers, livres littéraires et scientifiques…
Chaque période du Moyen-Age est marquée par son style particulier : le style insulaire indique ce qui précède le IXème siècle, le style carolingien ce qui se situe entre le IXème et le Xème siècle, le style roman date les enluminures réalisées entre le Xème et le XIIème siècle, la période de transition correspond au XIIIème et le style gothique estampille le XIVème siècle jusqu'au début du XVIème.
Aujourd'hui, faire perdurer la mémoire et les techniques du passé.
L'enlumineur du XXIe siècle ne doit pas seulement maîtriser la mise en couleur et la pose des feuilles d'or. Il doit aussi savoir préparer son support, dessiner et calligraphier.
La qualité de son travail dépend de son talent à choisir, puis à préparer ses pigments, qui peuvent être d'origine végétale, minérale, animale, de terres ou de métaux.
Le point culminant du travail de l'enlumineur est l'application des couleurs, dont dépend toute la profondeur et la vie de son œuvre, à travers les nuances obtenues, les transparences et les contrastes, les dégradés et les pointes de lumière.
L'enluminure est un métier d'art et d’excellence. Tout en respectant des règles ancestrales et des univers médiévaux, l'enlumineur fait désormais émerger des thèmes modernes. Artiste indépendant, il fixe lui-même ses prix.
La réalisation d'une œuvre peut requérir plus de cent heures… l'enlumineur travaille avec passion, calme et patience.
Comment devenir enlumineur ?
La seule école d'enluminure en Europe est donc l'ISEEM d'Angers qui dispense en 2 ans la formation "enlumineur de France" et délivre un diplôme reconnu de niveau IV (niveau équivalent au bac, au bac technologique, au brevet de technicien, au brevet des métiers d'art, au bac professionnel).
Pour suivre une formation professionnelle continue, il est possible de s'adresser à des associations et à des passionnés qui proposent des stages d’enluminure.
Alors, envie de vous y mettre aussi ?! Peut-être y-a-t-il une initiation proposée dans votre région de vacances ?
Cécile Douay
Crédit photo : tourisme montmorillon
Cet été, votre papeterie créative vous embarque dans un nouveau voyage : un périple dans le monde des métiers du papier ! Cette nouvelle série vous accompagnera pendant toutes les vacances, vous offrant des lectures culturelles et parfois même des idées de sortie sur vos lieux de villégiature.
Commençons par découvrir le calligraphe.
Quel noble métier que celui qui s'adonne à "l'art de la belle écriture", "l'art du trait" ! Son étymologie le dit bien : calligraphie vient des deux termes grecs, kallos, qui signifie beauté et graphein, l'acte de tracer.
Etre calligraphe, ce n'est pas seulement maîtriser le geste, la science des pleins et des déliés. C'est également faire appel à sa sensibilité artistique et à la gestion de son souffle, afin d'aboutir à un tracé élégant, bien proportionné et rythmé. En y mettant son âme, le calligraphe donne une expressivité aux caractères qu'il dessine.
Avant de pouvoir réaliser ses propres créations, il apprend à recopier des caractères anciens. Il suit alors un parcours le menant à la perfection du trait, en même temps qu'à un accomplissement de soi.
Trois grands courants de calligraphie existent : la calligraphie chinoise (orientale), la calligraphie latine (occidentale) et la calligraphie arabo musulmane.
Introduction à la peinture et aux arts graphiques, la calligraphie contemporaine vise davantage une expression artistique qu'une utilité. Reprenant vie au début du XXe siècle - après l'avènement de l'imprimerie comme support de l'écriture, elle trouve désormais son inspiration dans le futurisme et connaît même un regain dans notre société en quête de personnalisation.
Les hommes préhistoriques, les premiers calligraphes
Car la calligraphie est aussi ancienne que la volonté de l'homme de communiquer par le trait ! Certaines peintures des cavernes en sont des preuves splendides.
Avant l'apparition de l'écriture alphabétique, on pratiquait l'écriture idiographique, c'est-à-dire la représentation d'une idée par un signe. Les Sumériens, vers 5000 av. J.-C., utilisaient le cunéiforme tracé sur des plaquettes d'argile à l'aide de roseaux taillés en biseau. On peut également citer les hiéroglyphes égyptiens, vers 3000 av. J.-C., qui étaient de véritables œuvres d'art calligraphiées. Quant aux premiers idéogrammes chinois, ils remontent à 1500 av. J.-C.
Vers 1300 av. J.-C. apparaît le premier alphabet, l'alphabet phénicien, qui comprenait 22 lettres. Il fut suivi des alphabet grecs, hébreu, latin, arabe, tibétain, thaïlandais, cyrillique… Seuls les lettrés, savants et commerçants, avaient alors accès à l'écriture, et donc à la calligraphie.
Au Moyen-age, la science de la calligraphie est élevée à un niveau d'excellence par les moines qui, en y mettant toute leur foi, passaient leur temps à écrire et calligraphier des textes religieux.
Depuis l'invention de l'imprimerie, la calligraphie est devenue un art à part entière.
Le calligraphe d'aujourd'hui
A notre époque, on fait appel aux talents d'un calligraphe lorsque l'on souhaite personnaliser un texte, lui donner une autre dimension que s'il avait été écrit numériquement.
On peut ainsi lui confier la réalisation de calligraphies pour des mailings de grands couturiers, pour des diplômes, des ex-libris, des génériques de dessin animé, de film, de cd-rom multimédia, pour des logos et identités de marque, pour des illustrations de magazines ou de livres.
Le calligraphe moderne exerce souvent un autre métier en parallèle : graphiste, photographe, peintre d’enseignes, copiste, enseignant, typographe... Ses clients ? Des institutions, des ambassades, des entreprises, des joailliers, des marques de luxe, l'Imprimerie nationale…
Comment devient-on calligraphe ?
Une trentaine de formations non diplômantes et de durées variables sont proposées en France. L'Institut national des métiers d'art délivre toutes les informations. Quel contraste avec l'Orient où la formation dure une dizaine d’années !
Parmi les calligraphes français reconnus, citons Julien Chazal, auteur des trois livres "Mail Art & Calligraphie", "Bien débuter en Calligraphie" et "Calligraphie, le Guide Complet". Kitty Sabatier, installée à Toulouse, qui donne des stages jusqu'à l'étranger. Et Vincent Geneslay, co-auteur du livre "Calligraphie latine".
Envie de rencontrer des calligraphes pendant vos vacances ?
Cela tombe bien ! Plusieurs manifestations vous ouvrent leurs portes :
Allez-y avec vos enfants ! Qui sait, cela pourrait peut-être leur faire naître une vocation ?!
Cécile Douay
Crédit photo : 1001 stages
Nous voici au plein cœur de l'été ! Certains sont déjà revenus, d'autres partent seulement. Et quand il s'agit de passer ses vacances en famille, la culture occupe toujours un peu de place... A l'heure où la chaleur bât son plein, mais où quelques orages grondent, nous vous proposons un voyage bien au frais à travers de nouveaux musées, ceux qui nous parlent des métiers du papier.
Suivez le guide, votre papeterie créative Mille et Une Feuilles…
Première étape : le musée du Scribe à Saint Christol Les Alès dans le Gard, à la découverte du métier de calligraphe.
On y propose de nombreux stages de calligraphie ainsi qu'une très belle collection de documents et objets liés à l'écriture. Muni d'une plume d'oie ou métallique, d'un calame (un roseau taillé en pointe) ou d'un pinceau, le calligraphe exprime sa créativité à travers les caractères latins, chinois, hébraïques et arabes. Ses productions prennent toute leur ampleur sur du papier vélin ou du parchemin. Il peut ainsi réaliser des enveloppes, des diplômes et des ex-libris (une gravure personnalisée, un blason). Des marques de luxe et des clients prestigieux - l’Imprimerie Nationale, par exemple – peuvent faire appel aux talents d'un calligraphe, mais aussi des sociétés de production pour la réalisation de génériques de dessins animés, de films ou de DVD-ROM, et des agences de création ou d'édition pour la création de logos, d'images de marques, l'illustration de livres et de magazines.
Deuxième arrêt : le musée du Parchemin et de l'enluminure à Rouillon dans la Sarthe qui nous dévoile le métier d'enlumineur.
Les enlumineurs sont des artistes à part entière. Leur œuvre évolue avec l'air du temps, toujours dans le respect de l'univers médiéval. S'ils exposent souvent leurs créations originales, leur activité principale se situe dans la restauration et la réplique de manuscrits. Leur talent se met également au service des particuliers et des sociétés pour la réalisation de cartes de vœux, de menus, de diplômes, d’arbres généalogiques, de logos, de publicités, d’affiches, de blasons, d’écussons… La technique de l'enluminure consiste à dessiner au pinceau ou à la plume des lettrines et des ornements sur des manuscrits, des papiers d’art ou des parchemins. Puis, l'enlumineur les met en couleur avec une peinture aux pigments naturels, parfois associée à des feuilles d’or ou d’argent.
Troisième découverte : la fameuse Imagerie d’Epinal dans les Vosges, la seule entreprise à perpétuer les techniques ancestrales pratiquées par l'imagier au pochoir.
Dans la déco intérieure, la technique du pochoir est utilisée pour la décoration murale ou de mobilier. L'ameublement et la mode s'en servent également pour la peinture sur tissu. L’imagier au pochoir fabrique ses pochoirs dans du carton ou du métal (un par couleur), puis il passe la couleur à la brosse, au pinceau ou au tampon. Sur les murs de nos rues, c'est aussi cette technique que les artistes graffeurs utilisent.
Quatrième métier : le marbreur sur papier que l'on retrouve au musée des Arts et Métiers du Livre (le musée Michel Braibant) à Montolieu dans l'Aude.
Le marbré, le marbré d’Allemagne, le marbré à fleurs, à fleurons, à tourniquets, l’Annonay, le zigzag, la plume de paon, l’œil de chat, le peigné, l’agate, le placard, le montfaucon, le caillouté… Ces différentes familles de papier marbré s'obtiennent selon la façon dont l'artisan dépose et travaille les gouttes de peinture. Explication : dans une cuve remplie d'eau épaissie par une gomme hydrosoluble ou un épaississant, le marbreur fait flotter des gouttes de peinture à l’huile ou à l’eau. Après avoir formé ses motifs, il dépose dessus le papier qui prend l'empreinte par transfert. La marbrure à la main est aujourd'hui utilisée pour la reliure artisanale, mais aussi sur des objets recouverts de papier marbré telles que des boîtes, des accessoires d’écriture, des abat-jour…
Cinquième et dernière station : la librairie Auguste BLAIZOT à Paris dans le 8ème arrondissement, où l'on rencontre le métier de relieur et restaurateur de reliure.
On peut y acheter de superbes reliures décorées et participer à des concours de reliure. Qu'il s'agisse de reliure courante (ou classique), de reliure d'art (ou contemporaine) ou de restauration de reliure, l'objectif du relieur est de protéger et d'embellir un livre, tout en facilitant sa consultation. La reliure courante recherche davantage la sobriété et la solidité que la créativité. De nombreux étrangers viennent se former à la reliure française, qui jouit d'une notoriété internationale. La reliure d’art, qui se concentre sur l'esthétisme, s’adresse aux collectionneurs de livres rares et aux bibliothèques publiques qui souhaitent valoriser leurs fonds. Quant à la restauration de reliure, elle est dévolue aux livres de grande valeur historique ou artistique, le restaurateur cherchant à leur redonner leur aspect d'origine.
Sachez que toutes les informations pour se former à ces métiers du papier sont recensées sur le site de l'Institut National des Métiers d'Art.
Profitez bien de vos vacances ! N'hésitez pas à les agrémenter d'une petite visite dans un musée du papier ou dans un moulin du papier, à partir à la découverte des imprimeurs d'art et à les ponctuer d'activités manuelles, en compagnie de notre e-book loisirs créatifs !
Cécile d’Orthozen
Que vous soyez dans le sud à savourer le soleil ou… au nord de la Loire à profiter des musées, nous espérons que vous passez tous un bel été ! Notre e-book loisirs créatifs vous accompagne certainement, et peut-être avez-vous même visité l'un de ces musées du papier ou moulins du papier que nous vous avons conseillé.
En avant vers de nouvelles découvertes culturelles, cette fois-ci à travers les métiers du papier ! Imprimeur, vous connaissez n'est-ce pas ? Mais connaissez-vous les imprimeurs d'art ? Votre papeterie créative Mille et Une Feuilles vous emmène à la découverte de ces métiers d'art qui perdurent, pour le plaisir des yeux et de l'âme.
L'activité principale des imprimeurs d'art d'aujourd'hui est la réalisation d'estampes originales, par tirage de 15 à 200 exemplaires, perpétuant ainsi les techniques d'impression traditionnelles : lithographie, sérigraphie, taille-douce et typographie. Ils exercent leurs talents dans des ateliers spécialisés, car chaque technique requiert un matériel et un savoir-faire spécifiques.
Il y a en France une trentaine d'ateliers professionnels d’estampe, dont la moitié en région parisienne. Il existe également des ateliers associatifs qui accueillent les artistes et mettent à disposition le matériel pour leurs créations.
Aux plus anciens imprimeurs d'art - qui ont pour la plupart appris le métier directement auprès de leurs maîtres - succèdent des jeunes formés au sein de l’école Estienne, d'écoles des beaux-arts ou des arts décoratifs. Certains artistes se font même un nom en imprimant des estampes à tirages limités et numérotés, vendus à des collectionneurs privés, à des fonds publics comme la FRAC ou à des artothèques.
L'imprimerie d'art est un métier de précision, mêlant sensibilité artistique, créativité et intérêt pour l'univers de l'édition.
L'imprimeur en lithographie
La lithographie permet de reproduire le dessin qu'un artiste a tracé sur une pierre calcaire avec un crayon ou des encres grasses.L'imprimeur en lithographie place la pierre sur une presse lithographique et l'humidifie. Grâce à un rouleau, il applique l'encre sur la feuille de papier. Miró, par exemple, s'est beaucoup servi de la lithographie pour ses productions, et de nos jours, elle est surtout utilisée par les artistes pour diffuser leur œuvre, ou comme moyen d'expression à part entière.
L'imprimeur en sérigraphie
La sérigraphie s'apparente à la technique des pochoirs. Sur un support, qui peut être du papier, mais aussi du carton, du textile, du métal, du verre ou du bois… l’imprimeur en sérigraphie tend successivement des écrans de soie à maille fine perméable. A chaque passage, il applique une encre de couleur différente, qui reproduit la forme par obstruction de certaines mailles. Andy Warhol, avec notamment ses reproductions colorées de Marilyn Monroe, est un utilisateur emblématique de la sérigraphie.
L'imprimeur en taille-douce
Dans la technique de la taille-douce, le dessin est gravé sur une plaque de métal (cuivre, zinc ou acier) à l'aide d'un burin, d'une pointe sèche ou d'acide. Puis, l'imprimeur en taille-douce passe sous presse le papier humide et cette matrice, dont les incisions ont été encrées à la main ou au tampon. Ce procédé, dit "de gravure en creux", est utilisé par exemple pour la production de billets de banque ou dans le domaine de la philatélie.
L'imprimeur en typographie
La typographie est une technique d'impression en relief sur papier. L'imprimeur en typographie crée les caractères et les images en bois ou en plomb, qu'il encre et place sous presse. Avec l'apparition de l'offset, l'impression typographique se limite aujourd'hui à des travaux artisanaux, la réalisation de livres de bibliophilie (livres d'artistes, livres objets, éditions rares, livres anciens…), la découpe, l'embossage et l'estampage. Désormais, la création typographique répond aux besoins du design graphique, avec l'élaboration de polices numériques par ordinateur.
Votre ado, ou vous-même, vous sentez attiré par l'imprimerie d'art ? Sachez que vous trouverez tous les renseignements et les formations possibles sur le site de l'Institut National des Métiers d'Art
Petits et grands peuvent également découvrir tous ces métiers, rencontrer des professionnels et participer à des ateliers en visitant le fabuleux musée de l'imprimerie à Lyon.
Cécile d’Orthozen