Savez-vous que les véritables premiers fabricants de papier sont les guêpes ? Arrachant des fibres de vieux bois, des fragments de feuilles sèches, des débris de végétaux et les mélangeant à leur salive, elles produisent une matière avec laquelle elles construisent les rayons et l’enveloppe de leur nid. Du papier, ni plus ni moins !
Selon toute vraisemblance, c’est en observant le travail de ces guêpes « papetières », que les chinois inventèrent le papier, en transposant leurs gestes à l’échelle humaine. Plus précisément, c’est à MOUNG TIAN, général sous l’Empereur SHI-HOANG-ti de la dynastie des HAN, que l’on doit l’invention du papier 200 ans avant J.C.
En 105 après J.C., TSAI-LUN, Grand Eunuque protégé par l’Impératrice douairière, n’aurait fait que perfectionner et codifier la fabrication du papier, à base de cellulose tiré du mûrier, du bambou et du chanvre.
L’histoire du papier nous passionnera toujours autant … Cela vous dit, cet été, de partir avec nous à la découverte des papiers du monde ? Au programme : matières, textures, couleurs et senteurs ... Vous venez avec nous ?!
Première escale : l’Asie, où tout commença. C’est parti pour le grand voyage !
En Chine, du papier Bambou au wenzhou d’aujourd’hui
Le matériau privilégié pour la fabrication des premiers papiers chinois était le bambou, associé le plus souvent à des fibres et substances végétales ou animales, pour donner au papier finesse, résistance et lustre. Parmi ces fibres et substances : le rotin, la paille, l'hibiscus et le santal bleu qui donne au "papier de Xuan" la blancheur et la finesse recherchées par les calligraphes et les peintres.
Rapidement, la Chine développa une grande variété de papiers, dont l’usage s’est largement répandu dans la vie quotidienne et dans l’administration tout particulièrement, pour la monnaie, les archives, les examens, les éditions...
De nos jours, le papier traditionnel chinois appelé wenzhou, a malheureusement mauvaise presse auprès des spécialistes de la restauration de documents anciens. Ils lui préfèrent le papier japonais.
Le kozo, papier traditionnel japonais, a la cote
Pour réparer les documents endommagés, les spécialistes en restauration utilisent depuis plus de trente ans le papier traditionnel japonais appelé kozo. Grâce à ses fibres végétales très longues et intactes issues du mûrier, il conserve une vraie souplesse et une grande solidité par rapport aux papiers occidentaux.
La fabrication du papier aurait été introduite au Japon en 610 par Damjing, un moine coréen.
S’inspirant des méthodes chinoises, les papetiers japonais inventèrent des processus spécifiques pour obtenir des papiers d'une grande résistance et d'une extrême finesse, à partir de fibres de diverses espèces de moracées, comme le mûrier à papier ou le chanvre.
L'usage du chanvre déclina à la fin du VIIIe siècle au profit du mûrier à papier, apprécié pour la longueur et la robustesse de ses fibres.
L'écorce du mitsumata était appréciée pour ses qualités de douceur et de délicatesse, tandis que le gampi, un arbuste sauvage, donnait le plus beau papier, le plus résistant, le plus doux et le plus brillant, fabriqué dès le VIIIe siècle.
Aujourd’hui encore, la technique de fabrication japonaise, associée à l'attention portée au choix des matières premières, confère au papier traditionnel japonais des qualités exceptionnelles.
Il existe pourtant un autre papier de grande qualité, le hanji coréen, issu d’une tradition millénaire, qui gagne à être connu.
Le fabuleux et méconnu papier traditionnel coréen
On connaît très peu le papier coréen, mais les spécialistes de la restauration et de la conservation des papiers commencent à s’intéresser sérieusement à ses caractéristiques physiques et mécaniques, qui pourraient supplanter le papier japonais dans certaines utilisations.
Historiquement, la fabrication du papier est arrivée en Corée depuis la Chine dans les tout premiers siècles après J.C.
Le papier coréen était alors fait essentiellement des fibres libériennes du mûrier à papier. Le "papier de Jilin", jilinzhi, était le plus beau, aux longues fibres, épais, lisse, très résistant et d'un blanc ivoirien aux reflets soyeux. Il était réservé à la cour de Corée, mais aussi à la Chine, donné en tribut ou exporté à destination des peintres et des calligraphes, qui appréciaient sa douce robustesse.
De Corée, la Chine importait aussi d'autres variétés de papier, tel que le "papier cuir", dengpizhi, utilisé pour faire des couvertures de livres, des imperméables ou pour garnir les fenêtres.
Aujourd’hui, l’Asie se tourne vers le papier recyclé
Berceau du papier, la Chine est aujourd’hui une puissante locomotive pour le marché du papier recyclé. En 10 ans, ses importations de vieux papiers ont augmenté de 500 % (de 3,1 millions de tonnes en 1996 à 19,6 millions de tonnes en 2006).
Cette forte demande asiatique a permis au marché du recyclage d’être viable dans les pays collecteurs de papiers, mais aussi de sortir de la crise le marché du papier recyclé.
Quelle excellente nouvelle, face aux dangers de la déforestation indonésienne, dont nous vous parlions dans cet article : Tour du monde du papier, l'Asie !
Cécile Douay
Rédactrice Web pour Mille et Une Feuilles
Crédit photo : alphadxd.fr